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Channel: Chronique de Vanf – L'Express de Madagascar
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Moralité d’une histoire à la Raspoutine

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Le 29 décembre 1916, à Saint-Petersbourg, était assassiné Grigori Lefimovitch Raspoutine. Le journal français Le Figaro du 1er janvier 1917 avait annoncé la nouvelle, qui aurait donc dû parvenir à ses lecteurs de Madagascar, colonie française il y a encore un siècle. Tant de fantasmes continuent de courir sur la mort du «moujik illuminé». Une seule chose est certaine : les cercles artistocratiques russes, dont la mère de Nicolas II elle-même, voulaient se débarrasser de celui qui avait vraiment pris trop d’influence sur le couple impérial.
«Pour l’honneur de notre Tsar et pour l’avenir de la sainte Russie, il faut que ce misérable disparaisse» aurait déclaré un des conjurés. Ce que rapporte le prince Youssopov, époux de la nièce du Tsar et propriétaire du palais éponyme à Pétrograd.
«La fin de Raspoutine», titre du livre publié en 1927, n’a pas été commode : celui qui prétendait détenir des pouvoirs surnaturels, aurait d’abord résisté au cocktait d’une bouteille de vin et de gâteaux empoisonnés au cynaure ; le prince Youssopov dut se résoudre à lui tirer deux balles en pleine poitrine ; mais, titubant, il aurait encore réussi à s’échapper ; trois autres balles du député Pourichkevitch le mettent enfin à terre ; cependant, alors que les conjurés, dont le grand-duc Dimitri Pavlovitch cousin du Tsar, allaient jeter son corps dans la Néva, Raspoutine aurait encore eu un dernier sursaut de vie…
Ce récit fantastique est sans doute à mettre sur le compte de tout le mysticisme qui entourait le personnage et qui a pu impressionner jusqu’à ses ennemis, ceux-là même qui déclarent que «l’impératrice ne voit que par ses yeux, et le petit père le Tsar a si peu de volonté».
Comment un «mystique errant», qui prétendit avoir vu la Vierge Marie à l’âge de 16 ans, avait-il pu devenir «l’amant le plus formidable de toute la Russie  » Le «paysan illetré de Sibérie», le «simple homme du peuple, doué d’une singulière influence quasi magnétique, à demi illuminé et en même temps doué d’une remarquable dose d’astuce et de rouerie», put même diriger la Russie quand le tsar Nicolas II, parti sur le front de la guerre de 14, confia la gestion des affaires courantes à son épouse, dûment coachée par Raspoutine, dirions-nous aujourd’hui.
L’impératrice Alexandra Feodorovna était d’origine allemande ce qui lui sera reproché quand le Romanov Nicolas II et son cousin Hohenzollern Guillaume II allaient lancer leurs pays respectifs, la Russie et l’Allemagne, dans une guerre qui emportera les deux dynasties. En 1907, Raspoutine ayant réalisé le miracle de guérir son fils unique qui souffrait d’hémophilie, Alexandra lui devint redevable. Mais, on la dit fascinée, envoûtée, subjuguée. La rumeur fit d’elle la maîtresse de ce personnage infréquentable. Les caricatures nous ont laissé l’image d’un prédicateur en robe sombre, cheveux noir de jais, barbe brune fournie, et un regard hypnotique. Flatteries envers les autorités ecclésiastiques, fornication avec les princesses royales, orgies avec les aristocrates oisifs et crédules. La dernière légende au discrédit de Raspoutine serait d’avoir réussi à faire croire à l’empereur que tout allait bien en faisant ériger sur son passage des villes et des villages en carton-pâte pour cacher la misère et l’anarchie.
Le président de l’assemblée aurait pourtant tenté d’attirer l’attention du Tsar : «Personne ne vous ouvre les yeux sur le rôle véritable de cet homme. Sa présence à la Cour sape la confiance dans le pouvoir suprême».
Entre réalité d’alcôves et aveuglément impérial, désinformation bolchévique et fantasmes populaires, Raspoutine sera devenu le «saint diable» des ultimes années de la dynastie Romanov. Le Tsar Nicolas II, petit-fils de la reine Victoria d’Angleterre, fut contraint d’abdiquer pour épargner à la sainte Russie la révolte d’une population excédée. Enfermés dans la tour d’ivoire du château impérial, les Romanov ne surent pas saisir l’occasion de renoncer avant qu’il ne soit trop tard. Trois cents ans dynastie allaient se terminer dans le massacre d’un père et de son épouse avec leurs cinq enfants à Ékaterinburg. Suivirent soixante dix ans de cauchemar communiste. Ce genre de malentendu survient chaque fois qu’un illuminé, un escroc, une âme damnée, parvient à accaparer l’oreille d’un souverain.

Nasolo-Valiavo Andriamihaja


Requiem par un fou

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Johnny est mort. On en parle comme d’un vieil ami, d’un membre de la famille. Pour l’occasion, j’ai retrouvé le charme désuet d’écouter une vieille compilation d’il y a 25 ans sur l’anachronique radio-cassette de ma voiture. À l’époque, il m’avait fallu passer en revue une pile de disques vinyle, et patiemment, une chanson après l’autre, me confectionner mes best of à emporter. Impossible de raconter cette fastidieuse opération de «record-rewind-forward-play-stop-eject» à une génération pour laquelle même l’iPod est une antiquité. Pour l’instant, auto-reverse après auto-reverse, je me réjouis que la bande de ma cassette ne s’emmêle pas, parce que de stylo Bic, je n’en ai pas sous la main.
Johnny Halliday 1943-2017. L’ancienne idôle des jeunes avait fini par vieillir doucement. Un look d’éternel bad boy pour des chansons d’une fragilité déconcertante («Un jour viendra, tu me diras je t’aime, du bout du coeur, mais le dire quand même»). Bien sûr, on n’ira pas chercher chez Johnny ce qu’on s’attend à lire chez Jean d’Ormesson. Mais, la succession des textes doucement amers («Elle m’oublie»), faussement victimaires («Tu vas défaire tes cheveux rien que pour lui, tu vas lui dire les mêmes mots qu’à moi»), ou dangereusement charmants («Si mon coeur ne peut être pour toi le premier, j’attendrai afin d’être dans ta vie le dernier»), on s’identifie plus facilement avec Johnny.
Sa chanson sur l’Amérique m’avait fait entrevoir la géographie des States : «Mon Amérique à moi, c’est une route sans feux rouges, depuis l’Hudson River jusqu’en Californie». Et, au passage, je dus chercher à savoir qui était ce Norman Rockwell : finalement, un dessinateur qui a admirablement croqué la réalité des petites villes de l’Amérique profonde en un temps heureux qui ignorait le tsunami des selfies.
Johnny, on croirait qu’il fut plus souvent délaissé qu’il n’a semé de chagrin : «Revoilà ma solitude ; moi qui pensais qu’elle avait fini par me laisser, par m’oublier ; je te dois ma solitude, merci ; et je t’aime encore»… «Qu’est-ce qu’il m’arrive, mon coeur s’en va, à la dérive, noyé dans l’ombre de toi»… Heureusement, il nous ramène tout de suite après dans une réalité beaucoup plus authentique : «Avant que tu ne m’oublies, je voulais te dire merci ; pour ta bouche qui riait, que j’ai fait crier, tes yeux que j’ai fait pleurer ; pour ce morceau de ta vie, que je t’ai volé, ce séjour au paradis ; pour ton corps que j’ai aimé jusqu’à le tromper ; n’espère pas de moi des larmes, du repentir, je veux simplement, simplement te dire merci».
Commentant une de ses productions au succès mitigé, Johnny de dire : «Quand on a des paroles à défendre, c’est plus facile que quand on a des absurdités à chanter. La voix, elle est là, mais elle ne suffit pas. Il faut de jolis mots». Dans le clip de «Seul», on le voit anonyme au milieu d’une foule tandis que l’image finale le fait cheminer sur un boulevard désert : «Seul, avancer seul, vers un futur qu’on ne connaît pas, qu’on ne connaît pas». Des paroles passablement torturées, mais la voix, oui, elle est là.
Qu’importe finalement, sa vie, ses choix, seule importe sa voix. Il y a quelque chose comme la beauté d’un sanglot dans certaines paroles : «Je ne suis que la somme, je suis ceux qui m’ont aimé, je suis ceux que j’ai aimés». Ou l’immortalité du désespoir : « Salut Charlie, tu es parti, mon frère, boire ton dernier verre, au grand bar de l’éternité, je boirai dans ton verre, et du haut de ton enfer, tu me verras peut-être pleurer, l’amitié en guenilles était ma seule famille, grâce à toi je m’en étais tiré»…
La vie et ses nombreuses promesses qui n’engagent que celles et ceux qui y croient : «Je te promets le sel au baiser de ma bouche, je te promets le miel à ma main qui te touche ; et même si c’est pas vrai, si on te l’a trop fait, si les mots sont usés, comme écris à la craie, on fait bien de grands feux en frottant des cailloux, peut-être avec le temps, à la force d’y croire, on peut juste essayer pour voir». Juste pour voir. Un dernier texte a quelque chose de prémonitoire : «Ça ne peut pas finir, il y a trop de souvenirs ; et même si je pars, je ne te quitte pas. Ça ne finira jamais, on refera la route, je vous le promets». J’en mettrai pas ma main au feu.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Un peu trop près de Dieu

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Depuis le 6 décembre 2017, et la décision de Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël, la tonalité des capitales arabes et musulmanes est à la colère. Mais, quand une foule turque ou indonésienne prétend que la Palestine appartient aux musulmans, j’ai envie de dire : « mais, de quoi se mêlent-ils ? ». Des Jordaniens peut-être, oui, puisque c’est le royaume hachémite qui gère l’esplanade des mosquées, surtout que la Jordanie a annexé la «Palestine palestinienne». Les Palestiniens a fortiori, puisqu’ils sont le peuple éponyme de cette terre disputée, avec la Judée des juifs. Mais, pas des musulmans de 10.000 kilomètres qui s’astreignent certes au pèlerinage, mais pas celui de Jérusalem, celui de La Mecque.
Justement, le stationnement des troupes américaines en Arabie saoudite, pendant la guerre du Golfe, avait été qualifié de souillure. Un courant islamiste très actif excitant les foules arabes et musulmanes à avoir une lecture la plus obtuse possible du Coran, de l’épopée de Mahomet et de tous les temps pré-islamiques. Dans cette nouvelle posture, puisque c’est en Arabie qu’est né l’islam, l’Arabie appartient à tous les musulmans…
Quand Donald Trump, président des États-Unis déclare, «Nous allons déplacer l’ambassade des États-Unis en Israël à Jérusalem», Benyamin Netanyahou, Premier Ministre d’Israël, approuve : «Jérusalem est la capitale d’Israël depuis trois mille ans». Milos Zeman, président de la République tchèque, renchérit : «L’ambassade tchèque en Israël devrait également se trouver à Jérusalem».
Grâce à sa victoire militaire de la «Guerre des Six Jours», en juin 1967, Israël a annexé purement et simplement Jérusalem. Déjà, fin décembre 1948, l’opération militaire appelée «Fait Accompli» avait permis à Israël de s’assurer le contrôle du Néguev méridional, s’assurant ainsi un débouché sur la Mer Rouge par le golfe d’Akaba. En une rare résolution onusienne suivie d’effet, la résolution 478 (28 août 1980) du conseil de sécurité de l’ONU, treize pays, ayant une mission diplomatique à Jérusalem, acceptent de la déplacer à Tel-Aviv.
Dans sa thèse de doctorat («Les relations extérieures de Madagascar de 1960 à 1972», L’Harmattan, 1986), Césaire Rabenoro, ancien ambassadeur de Madagascar accrédité en Israël, de 1967 à 1970, avec résidence à Londres, détaille les «relations particulières» de la Première République malgache avec Israël. Madagascar avait un Chargé d’Affaires en son ambassade ouverte à Jérusalem, à partir de novembre 1966 : «L’installation de ce diplomate malgache à Jérusalem signifie que Madagascar reconnaît la ville sainte comme la capitale d’Israël, à la différence des pays occidentaux comme les États-Unis ou la France qui ont leur mission diplomatique à Tel-Aviv» (page 205). Auparavant, un accord de coopération technique israélo-malgache avait été signé à Jérusalem, le 27 août 1961 (p.278).
À la fin de son mandat, Bill Clinton avait été sur le point de faire s’entendre Ehud Barak et Yasser Arafat sur le partage de la Palestine et de Jérusalem. Mais, la visite d’Ariel Sharon, sur l’esplanade le 28 septembre 2000, déclenche la deuxième intifada. Le Premier ministre israélien Ehud Barak démissionne le 9 décembre 2000 et les élections législatives anticipées permettent à Ariel Sharon de devenir Premier Ministre, le 6 février 2001. Le plan de paix était déjà enterré depuis le 20 janvier 2001, jour de prise de fonction de George Bush comme nouveau président des États-Unis.
L’acte unilatéral de Donald Trump aura eu le mérite de remettre à l’agenda cette vieille solution présentée in extremis par l’administration de Bill Clinton. Ce plan reprenait d’ailleurs les recommandations oubliées de Morrisson-Grady de juillet 1946. Soixante dix ans plus tard, tout le monde chante en choeur la solution à deux États, à commencer par Antonio Guteres, Secrétaire Général de l’ONU : «Jerusalem is a final-status issue that must be resolved through direct negotiations between the two parties. There is no alternative to the two-state solution». Mais également Angela Merkel (Allemagne), Émmanuel Macron (France), Paolo Gentiloni (Italie) ou Federica Mogherini (Union Européenne). La chef de la diplomatie européenne précise qu’aucune ambassade ne devrait s’installer à Jérusalem avant qu’un accord israélo-palestinien sur la Ville Sainte n’ait abouti.
La Chine, l’exprime d’une autre manière, en étant favorable à la création d’un État palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale, tout en recevant le Premier Ministre israélien pour les 25 ans de relations diplomatiques entre les deux pays. Le 6 avril 2017, c’est-à-dire huit mois avant la décision américaine, le ministère russe des Affaires étrangères avait indiqué que «Jérusalem-Est devrait être la capitale du futur État palestinien. Parallélement, nous devons établir que, dans ce contexte, nous voyons Jérusalem-Ouest comme la capitale d’Israël».

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Un peu trop près de Dieu

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Beit ha-Mikdah (hébreu) ou Bayit al-Maqdis (arabe) : le temple, Jérusalem la ville du temple de Salomon, la capitale du roi David. Il me semble que, quand on parle de Jérusalem, c’est d’abord pour évoquer «Le mur des Lamentations», dernier vestige du temple juif que les troupes romaines de Titus avaient détruit en l’an 70, voilà près de 2000 ans. Certes, un élément de langage nous fait réciter que la ville est trois fois sainte pour les juifs, les chrétiens et les musulmans, mais l’histoire est têtue : le tombeau de Jésus (chrétien) ou la mosquée al-aqsa (musulman) ne peuvent avoir précédé le culte juif dans Jérusalem (ainsi qu’à Jéricho, Béthanie, Hébron, Béthléem, Nazareth, Tibériade, Galilée…).
C’est le 23 janvier 1950 que l’assemblée israélienne, le Knesset, a proclamé Jérusalem comme capitale d’Israël, tandis que l’ONU s’employait à internationaliser la Ville. Cette proclamation, on l’aura compris, n’était qu’une officialisation.
Et c’est exactement ce que disent deux anciens ambassadeurs des États-Unis en Israël. Daniel Shapiro (ambassadeur de 2011 à 2017) : «Jérusalem est la capitale d’Israël et il est approprié de le reconnaître en tant que tel. L’opportunité manquée, ici, toutefois, c’est l’échec à inscrire cette décision dans le contexte de la réalisation de notre objectif stratégique plus large, qui est une solution à deux États». Edward Walker Jr (ambassadeur de 1997 à 1999) : «Je pense qu’il est temps. Nous avons été négligents de ne pas reconnaître la réalité telle qu’elle est. Nous savons tous qu’Israël a une capitale. Nous savons tous qu’elle s’appelle Jérusalem. Et, au cours de mes 35 années de service au Moyen-Orient, personne n’a jamais remis cela en question».
Quant aux voix musulmanes de la raison, elles ont du mal à se faire entendre. Celle de l’émirati Khalaf Ahmad Al-Habtoor, qui, certes, écrivait avant la déclaration de Donald Trump : «reality dictates that pragmatism must prevail over what has become a mirage. I was once an idealist ; no longer. Unrealistic dreams are of no use to a people yearning for a place where they can live peacefully and prosper in dignity». Il en appelle au courage d’idées nouvelles, évoque l’idée d’une solution à deux États, mais ne balaie pas la coexistence pacifique et digne des Israéliens et des Palestiniens au sein d’un État unique.
Celle également du Pakistanais Mobarak Haidar. Depuis 1400 ans, dit-il, et la conquête de la Kaaba à La Mecque, les musulmans n’ont plus jamais prié tournés vers Jérusalem qui est saint grâce aux prophètes d’Israël, depuis Moïse jusqu’à Jésus ; les chrétiens avaient pu être maîtres de Jérusalem avant la naissance de l’islam et Jérusalem demeure une ville sainte pour les chrétiens, mais les chrétiens ne revendiquent pas pour autant la propriété de Jérusalem ; les musulmans n’ont aucun droit religieux à gouverner Jérusalem ; il fait remarquer que, jamais, les musulmans d’Iran, du sub-continent indien, d’Asie du Sud-Est, d’Afrique, n’ont été maîtres de Jérusalem et ne peuvent donc prétendre qu’à de liens spirituels.
«Un peu trop près de Dieu» est le titre d’un ouvrage (2000) de David Horovitz, ancien rédacteur en chef du Jérusalem Post et fondateur, en 2012, du journal en ligne «The Times of Israël». Un peu trop près de Dieu, trois fois trop près de Dieu, c’est la tragédie de cette Terre dite promise.
Il y a 2000 ans, les Romains détruisaient le temple juif. Le 26 août 1098, précédant donc la prise de Jérusalem par la Croisade du 15 juillet 1099, ce sont les Fatimides d’Égypte qui en avaient chassé les soldats turcs du calife de Bagdad. Plus tôt encore, dès le 1er août 1096, répondant plus rapidement à l’appel du Pape Urbain II du 27 novembre 1095, la «croisade populaire» conduite par Pierre l’Érmite arrive à Constantinople : cohorte sans armes mais en guenilles qui se livra au brigandage et à des pogroms antisémites en route. Avant d’être à son tour victime : 12.000 chrétiens auraient été massacrés par les troupes ottomanes dans la seule journée du 10 août 1096. À chaque «alternance», les populations locales, chrétienne ou musulmane, mais plus généralement juive, seront massacrées. Mœurs «ordinaires» de ces temps barbares, qui n’en soulignent que davantage la «magnanimité» dont fit preuve Saladin après sa conquête de Jérusalem le 2 octobre 1187, non sans avoir fait exécuter 300 Templiers et envoyé à l’esclavage dix milliers de jeunes… Huit siècles plus tard, le 9 décembre 1917, un mois après la «déclaration Balfour» et juste à temps pour Noël, le général britannique Allenby entrait à pied dans Jérusalem, arrachée aux troupes ottomanes, signant le grand retour des chrétiens dans la Ville Sainte.
Tant de personnages illustres assassinés : Lord Moyne, le comte Bernadotte, Itzhak Rabin. Trop d’enfants, de femmes, d’hommes, juifs, chrétiens, musulmans, inutilement sacrifiés. Jérusalem, en la «Terre promise», au coeur du «Croissant fertile» : un pôle sur les eaux du Nil, un autre pôle sur celles du Jourdain, un dernier pôle entre Tigre et Euphrate. Pour ainsi dire, c’est là préférentiellement que L’Homme créa Dieu. Les gens, plutôt que de lire uniquement la Torah, la Bible ou le Coran, avec des oeillères, devraient consulter les livres d’histoire.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Un pas en avant, deux pas en arrière sur les îles éparses

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«Pour faire face aux réalités du monde d’aujourd’hui et pour être certain d’aider les pays à rester dans la trajectoire de l’Accord de Paris sur le climat, nous ne financerons plus les projets d’exploitation de pétrole et de gaz à compter de 2019». C’est l’annonce choc faite par Jim Yong Kim, président de la Banque mondiale, au récent One Planet Summit de Paris.
À moins de se tourner vers des «financements parallèles», voilà qui sonne le glas des perpsectives mirifiques d’énérgies fossiles dans nos eaux territoriales. Voilà également qui apaisera la querelle entre Madagascar et la France, à propos des îles éparses. C’est un peu la fin d’une époque : l’enjeu énérgétique des îles éparses bientôt vidé de sa substance, ces hydrocarbures, avérées ou supposées, dans les 640.000 km2 de ZEE (zone économique exclusive) autour de ces «confettis».
Enjeux déjà tardifs aujourd’hui et anachroniques dans le monde de demain. À moins de faire valoir, comme l’avait osé la Chine, l’injustice de voir le reste du monde renoncer à la solution de facilité des énergies fossiles alors que l’Europe et les États-Unis ont justement fondé leur prospérité en puisant à gogo dans le charbon, le sable bitumeux, le pétrole et le gaz. Non sans avoir abondamment souillé les océans et pollué l’atmosphère. Comme le rappelle Antonio Guterres, Secrétaire Général des Nations Unies, «les pays pauvres émettent le moins de gaz à effet de serre mais en subissent le plus les conséquences».
Avant qu’elles ne retombent doucement dans l’indifférence, et comme je doute qu’un seul écolier malgache (comme bien de Malgaches) connaisse ces îles éparses, autant essayer de les visualiser ici. Déjà, les îles éparses n’ont aucun nom malgache. On les appelle ÎLES GLORIEUSES (superficie de 7km2, ZEE de 48.350 km2 ; située à 220 kms à l’Ouest de Madagascar, à autant de distance de Mayotte ; un détachement de la Légion Étrangère demeure sur place ; une station météo y opère depuis 1955 ; possession française depuis le 23 août 1892) ; JUAN DE NOVA (découverte par un navire portugais en 1501 ; 5km2 de superficie, à 150 kms des côtes malgaches ; ZEE de 61.050 km2 ; un détachement du 2ème Régiment de parachutistes d’infanterie de marine stationne sur place ; une station météo opère depuis 1973 ; dépendance française par l’acte du 31 octobre 1897, en application de la loi du 6 août 1896) ; BASSAS DA INDIA (récifs de 86 km2 mais seulement 200 m2 émérgés à marée haute, 123.700 km2 de ZEE ; aucune présence humaine n’y est possible) ; EUROPA (découverte par le navire anglais «Europa» en 1774 ; située à mi-chemin entre l’Afrique et Madagascar ; dépendance française par l’acte du 31 octobre 1897 en application de la loi du 6 août 1896 ; superficie de 30 km2, ZEE de 127.300 km2 ; un détachement du RPIMA stationne sur place ; une station météo opère depuis 1949 ; une piste d’attérissage aménagée en 1973).
Longtemps, nous avons été obnubilés par les fameux accords de coopération (quatre signés le 2 avril 1960 et douze signés le 27 juin 1960), dont la rénégociation, actée le 4 juin 1973 à Paris, avait forgé la gloire d’un certain Didier Ratsiraka, alors Ministre des Affaires Étrangères. Quand, en 1973, Madagascar a enfin évoqué les îles éparses, on peut raisonnablement croire que la plupart des Malgaches étaient surpris de leur existence. Le 10 février 1976, Didier Ratsiraka, élu entretemps Président de la République, écrivait au Secrétaire Général de l’ONU faisant valoir «les droits historiques de Madagascar sur ces îles». Affirmation quelque peu audacieuse quand on sait qu’aucune prise de possession, même symbolique, de notre part n’a jamais eu lieu.
Le 14 octobre 1958, le Congrès des assemblées provinciales votait, par 208 voix et 26 abstentions, le sort de Madagascar : «État libre, sous la forme républicaine». Le lendemain, le Haut-Commissaire André Soucadaux s’adressait à ce Congrès : «Autorisé par le Gouvernement de la République, je prends acte en son nom du vote intervenu le 14 octobre 1958. Je proclame en son nom que le Gouvernement de la République reconnait solennellement l’institution de l’État malgache, la caducité de la loi (d’annexion) du 6 août 1896».
Si les îles Juan de Nova et Europa avaient été déclarées «dépendance de la France» par l’acte du 31 octobre 1897, et l’érection du pavillon français, si cet acte avait été pris en application de la loi du 6 août 1896, et si le Haut-Commissaire de la République française déclarait cette dernière loi caduque : CQFD… Sur le terrain, et dans la réalité, on est moins dans des arguties juridiques théoriques que dans la présence physique très militaire sur les îles éparses d’un détachement du 2ème RPIMA : dissout en 1962, ce régiment des parachutistes d’infanterie de marine allait renaître en 1965 à Ivato, où il restera basé  jusqu’en 1973, et l’évacuation de toutes les troupes françaises.
Le 10 mars 1952, André Soucadaux, le Haut-Commissaire de la France à Madagascar,  accordait au franco-mauricien Hector Patureau une concession de quinze ans sur Juan de Nova. Ce contrat sera modifié en juillet 1961, par le Préfet de la Réunion. Le 1er avril 1960, en effet, la France avait pris la précaution de détacher les îles éparses de la colonie Madagascar. Leur exploitation (coprah, cocoteraie, guano) était confiée à des particuliers. Comme par exemple la SOFIM (société française des îles malgaches) qui employait des ouvriers mauriciens et seychellois.
Des îles éparses sans appelation malgache donc, mais une «société française des îles malgaches» : voilà sans doute une première idée de la co-gestion sur ces îles éparses évoquée par l’ancien président français François Hollande… Quoique : le concept de co-gestion avait d’abord été avancé par la Commission de l’Océan Indien en 1999. Et c’est ainsi que des négociations bilatérales ont permis à la France et l’île Maurice de conclure le 7 juin 2010 un accord-cadre de «cogestion économique, scientifique et environnemental» sur Tromelin, sans qu’il soit question d’abandon de souveraineté par la France. Cette démarche amiable a évité à la France l’ignominie d’être traitée de pays colonial comme a eu l’audace de dire Anerood Jugnauth, ancien Premier Ministre mauricien, à propos du contentieux britannico-mauricien à propos de l’archipel des Chagos : en obtenant le vote de la résolution du 22 juin 2017, l’île Maurice en a fait une affaire de décolonisation qui ne peut se régler de façon bilatérale.
Depuis le 31 octobre 1897 jusqu’au 1er avril 1960, et depuis cette époque jusqu’à ce jour, en passant par la loi française 2007-224 du 21 février 2007, qui fait des îles éparses le cinquième district des Terres Australes et Antarctiques Françaises ou l’octroi, en décembre 2008, de permis exclusifs d’exploration offshore, la France a maintenu avec rigueur une position de principe. De son côté, Madagascar n’a pas toujours eu cette cohérence dans l’approche des îles éparses : inconnues avant 1896, négligées en 1960, revendiquées pour le principe seulement en 1973. Le 8 novembre 2017, dernier, en Conseil des Ministres, Madagascar incluait les îles éparses dans sa ZEE. Mais, savons-nous seulement que le 5 mai 1962,  le gouvernement malgache transmettait à l’ambassade de France les dossiers administratifs concernant les îles Glorieuses et Juan de Nova ? Un pas en avant, deux pas en arrière…

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Le prétexte Napoléon-Joséphine

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C’était le 16 décembre 1809 : «Sénatus-consulte portant dissolution du mariage contracté entre l’empereur Napoléon et l’impératrice Joséphine (…) L’an 1809, et le quinzième jour du mois de décembre, à neuf heures du soir, nous, Jean-Jacques Régis Cambacérès, “prince”, archi-chancelier de l’empire, duc de Parme, exerçant les fonctions qui nous sont attribuées par le titre II, article 14, des statuts de la famille impériale»… Le 15 décembre 1809, à neuf heures du soir, en effet, répondant à une lettre close de «sa majesté empereur et roi», Cambacérès s’était rendu au grand cabinet du palais des Tuileries pour y recevoir «de (notre) part et celle de l’impératrice, (notre) chère épouse, une communication de grande importance».
Ce 15 décembre 1809, l’empereur Napoléon (1769-1821) et Joséphine de Beauharnais (1763-1814) divorçaient. Le couple n’ayant pas pu avoir d’enfant ensemble, malgré leur nombreuse respective progéniture, l’amour fut immolé sur l’autel de la raison d’État. Néanmoins, Napoléon lui laissa le titre d’Impératrice des Français.
Joséphine, Créole née à La Martinique, était immensément belle dit-on. Poussant le général Bonaparte à l’épouser absolument le 9 mars 1796. Oh, Joséphine n’était certes pas l’Hyménée des bulles papales qui préconisent l’abstinence jusqu’en 2017. On lui connaissait une liaison avec le général Lazare Hoche dont elle fit la connaissance en prison ; on citait également Barras «le roi du Directoire» qui lui présenta Bonaparte ; ou encore un capitaine de hussards avec lequel elle trompera le général Bonaparte nommé à la tête de l’armée d’Italie (1796), poste qu’il obtint d’ailleurs grâce à l’entregent-entremise de Joséphine. Veuve du vicomte Alexandre de Beauharnais, qui fut guillotiné en 1794, Joséphine en gardera le nom. De ce précédent mariage sont nés Eugène et Hortense, cette dernière étant la mère du futur Napoléon III (1808-1873). Un large pan du XIXe siècle français.
Le 9 novembre 1799, Bonaparte mettait fin au Directoire par «le coup d’État du 18 brumaire», concocté par les révoulutionnaires de 1789 qui auraient accepté tout, sauf le retour des royalistes au pouvoir. Napoléon, «dictateur de salut public», est un exemple à méditer de despote éclairé (expression du siècle européen des Lumières, au XVIIIe siècle) : jusqu’à Madagascar, on lui doit tout de même les principes du «Code Civil». La France en particulier continuant d’arborer sa Légion d’Honneur ; l’élite française assurant une belle assiduité à fréquenter son École Polytechnique ; et il n’est pas jusqu’à l’hommage populaire rendu à Johnny Halliday qui n’emprunte la belle avenue couronnée de son Arc de Triomphe.
Alors, quoi, quelle moralité à l’histoire ? Despote éclairé ou «génial usurpateur» ? C’est par cette dernière expression que Raombana, un des anciens élèves de 1821 envoyés par Radama 1er en Angleterre, et issu d’une famille évincée par l’accession d’Andrianampoinimerina au pouvoir en 1785, qualifia le grand roi de notre histoire nationale. Les Chinois parlent de «mandat du Ciel» : une légitimité fondée sur la droiture et la générosité, la réussite incontestable d’une mission contestée. Sans jamais négliger les grands accommodements avec les menues choses de la vie : amour, désamour, divorce. Le nez de Cléopâtre.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Dans le doute, s’abstenir

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9 Contre, 33 Abstentions, 128 Pour. Retrouver le nom de Madagascar associé à une cause commune avec la Turquie, l’Iran et l’Arabie saoudite, les trois ensemble, m’indispose. C’est pourtant ce que Madagascar a fait en votant la résolution condamnant le choix par les États-Unis de déménager à Jérusalem leur ambassade en Israël.
Bien entendu, pas plus que Donald Trump n’a consulté les Américains avant de prendre sa décision, Hery Rajaonarimampianina n’a pas demandé leur avis aux Malgaches avant de faire voter cette résolution présentée à l’assemblée générale des Nations Unies. Mais, mon malaise malgache tient à une simple question : «Qu’a Madagascar à s’aligner sur l’unanimité de la Ligue arabe ou le consensus de la conférence islamique ?». Et s’il fallait s’impliquer dans cette cause qui n’est pas la nôtre, oserions-nous une voix dissonante pour interroger la naissance de la Jordanie sur le dépeçage de la Palestine ?
Je me plais à me demander : si j’avais été l’ambassadeur de Madagascar, dans cette affaire, qu’aurais-je fait ? En tous les cas, je n’aurais pas appliqué la consigne de vote sans avoir longuement discuté et expliqué pourquoi, à mon avis, Madagascar se fourvoie dans un combat qui n’est pas le sien. J’espère que la «communauté internationale» nous sera d’une même quelconque utilité, même symbolique, dans une prochaine question existentielle.
Le Canada, l’Australie, l’Argentine, la République tchèque (les fusils, qui devaient armer les Juifs en 1948, provenaient déjà en majeure partie de l’ancienne Tchécoslovaquie), ont péféré s’abstenir. S’il fallait choisir, ce sont là des pays où je pourrais vivre. Ce qui n’est pas le cas des autres : l’Afghanistan et ses talibans, l’Iran et ses ayatollahs, l’Arabie saoudite et son wahhabisme, la Turquie du sultan Erdogan… D’autres pays, dont la démocratie et la gouvernance équitable nous font envie, ont également voté cette résolution : ce qui enlève un peu à ma honte de voir Madagascar associé à cette résolution présentée par des pays musulmans dont l’islam ne brille ni par sa modération ni sa tolérance. Mais, l’Allemagne, la France ou la Suède, ont leur cohérence diplomatique qui n’est pas nécessairement la nôtre.
Après la décision de Donald Trump, le prési­dent tchèque Milos Zeman avait accusé l’Union européenne de lâcheté à ne jamais oser «dire» la réalité historique. À faire du suivisme, dans le feu de l’actualité, on sacrifie l’histoire et on hypothèque l’avenir. N’oublions pas pourquoi les États-Unis avaient déjà quitté l’UNESCO : parce que de trop nombreuses résolutions, d’initiative arabo-musulmane, cherchent résolument à dénier toute antériorité juive dans la région. Seulement, l’histoire est têtue : l’association des noms de Jérusalem et d’Israël a précédé de 3000 ans la naissance du christianisme et de l’islam. Plutôt que la menace d’une rétorsion, mal vécue, les amis d’Israël devraient avoir une meilleure communication face au révisionnisme moderne.
Yom Yerushalayim, la «journée de Jérusalem», est organisée par Israël depuis 1977, pour le dixième anniversaire de sa victoire de la «guerre des Six Jours» : les Israéliens célébrent une «réunification», tandis que les Arabes dénoncent une «annexion». Pour le 50e anniversaire de la conquête de Jérusalem, Yom Yerushalayim avait été célébrée le 21 mai 2017.
9 Contre, 33 Abstentions, 128 Pour, 23 Absents. L’abstention ou la politique de la chaise vide : Cameroun, Centrafrique, Colombie, Congo-Kinshasa, Salvador, Géorgie, Guinée-Bissau, Kenya, Mongolie, Myanmar, Moldavie, Saint-Kitts, Sainte-Lucia, Samoa, San Marin, Sao-Tome-et-Principe, Sierra Leone, Swaziland, Timor Oriental, Tonga, Turkmenistan, Ukraine, Zambie. Vingt-trois ambassadeurs donc s’étaient, fort opportunément, retrouvés ailleurs.
À la caféteria, au bar d’en face, à leur résidence… Madagascar, étant vice-président de l’Assemblée Générale, du haut de notre petitesse, nous aurions envoyé un message fort, un symbole aussi significatif que le vote de cette résolution sans pouvoir contraignant.
Tiens, ramené à 128 contre 65, le vote de la Résolution a soudainement quelque chose de moins «unanime». C’est quand même le tiers de l’ONU qui n’a pas soutenu la Résolution. Madagascar n’aurait pas été si seul…

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Les pavés du Chemin de Jérusalem

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Dans «Le Chemin de Jérusalem» (Fayard, 1997), Boutros Boutros Ghali raconte comment il occupa ses pensées pendant que le président égyptien Anouar el-Sadate et sa délégation priaient à la mosquée Al-aqsa de Jérusalem : vingt-six ans plus tôt, en 1951, le roi Abdallah de Jordanie y avait été assassiné par un Palestinien l’accusant de collaborer avec Israël ; ce dimanche 20 novembre 1977, des milliers d’autres Palestiniens se tenaient devant la mosquée pour protester contre la visite de Sadate en Israël et à Jérusalem.
Moins d’un mois plus tôt, Boutros Boutros Ghali avait été nommé Ministre d’État des Affaires étrangères : dans l’organisation égyptienne de l’époque, le Ministre d’État s’occupait de problèmes diplomatiques spécifiques confiés par le Président de la République tandis que le Ministre des Affaires étrangères administrait des questions plus globales. Son témoignage de ces années 1977-1978 est particulier parce qu’il émane d’un Arabe, de religion copte chrétienne, dont l’épouse est juive.
Ainsi, il raconte ses souvenirs de sa mère se préparant pour le pèlerinage du Caire à Jérusalem, «un pèlerinage aussi important pour un copte que le hadj pour un musulman» (pp. 30-31). Mais, son appréhension d’une perte définitive de Jérusalem est celle d’un Arabe, inquiétude que peuvent partager d’autres Arabes sans nécessairement les outrances des arabo-islamistes.
Ce jour de Noël 2017, le président du Guatémala a décidé de suivre Donald Trump en faisant déménager l’ambassade de son pays à Jérusalem. Le Premier Ministre israélien, Benyamin Netanyahou, prétend, de son côté, être en pourparlers avec de nombreux États pour concrétiser la même démarche. En novembre 1977, Sadate avait décidé de prendre la parole devant la Knesset, le Parlement israélien, pour sortir de l’impasse diplomatique et asséner un choc psychologique.
«Israël de retour en Afrique» fut le slogan-choc de la tournée est-africaine de Benyamin Netanyahu, en juillet 2016, à la rencontre de ses homologues de l’Ouganda, du Sud-Soudan, de la Tanzanie, du Rwanda, du Kenya et de l’Éthiopie. En juin 2017, le Premier Ministre israélien avait été invité à l’ouverture du Sommet de la CEDEAO (communauté économique de l’Afrique de l’Ouest). Une prochaine visite israélienne dans l’Océan Indien éclairerait mieux les esprits que des menaces de sanction pour vote dissident à l’ONU.
Expliquer quoi ? Que, vers 1760 avant J.-C, Abraham «le père de la multitude», quitte Sumer pour la terre de Canaan, située entre le Jourdain et la Méditerranée, ce qui correspond géographiquement à l’actuelle Palestine. Chassés de Canaan par la famine, ils se fixent en Égypte à l’appel de Joseph, un des douze fils de Jacob surnommé «Israël». Sous la conduite de Moïse, les douze tribus sortent d’Égypte vers 1300 avant J.-C.. Après le règne de Salomon (970-930), le royaume se scinde en deux : Israël dans le Nord de Canaan, Juda dans la partie méridionale. En 722 avant J.-C., Israël est détruit par les Assyriens tandis que Juda est battu par Babyone en 586 avant J.-C.. Les Hébreux retrouvent leur indépendance en 165 avant J.-C. Jusqu’à l’arrivée des Romains, qui détruisent le temple de Jérusalem en l’an 70 avant d’annihiler l’État juif antique en l’an 135 de notre ère. Mais, se souvenir également avec humilité que même à Abraham, père d’Isaac, grand-père de Jacob, arrière-grand-père des douze tribus d’Israël, les pyramides des Pharaons pourraient dire «nous étions là avant».
Pendant que Sadate se rendait à Jérusalem pour faire bouger les lignes, Madagascar aimait à s’afficher comme progressiste : ce groupe de pays avec le Bénin, la Libye et l’Algérie, que Boutros Boutros Ghali qualifie d’agressifs et provocateurs. Au contraire des alliés modérés de l’Égypte, comme le Sénégal ou l’île Maurice. À cette époque, de non-alignement engagé derrière l’URSS, Cuba et la Corée du Nord, les relations américano-malgaches étaient du niveau du chargé d’affaires : «l’ennemi principal est l’impérialisme américain, avec ses alliés sud-africains sur le continent (africain) et sionistes au Moyen-Orient».
La rupture avec Israël ouvrira Madagascar aux capitaux arabes, dans ces années 1976-1977 de nationalisation du secteur pétrolier : Banque arabe de développement économique en Afrique (1250 mil­lions FMG dans un projet routier, intérêts dans le barrage d’Andekaleka), Fonds koweitien pour le développement (créé en décembre 1961, apport de capitaux dans la société de pêcherie FAMAKO et 1650 mil­lions FMG pour la construction de la route Fénérive-Soanierana-Ivongo), Fonds saoudien (créé en septembre 1974, participe au montage financier multinational pour la construction du barrage hydro-électrique d’Andekaleka : une station hydrométrique dite Rogez-Andekaleka, était active depuis 1928, sur la rivière Vohitra), Fonds de l’OPEP pour le développement international (créé en août 1976, apporte 775 millions de FMG de soutien à la balance des paiements en janvier 1977), prêt libyen de 3 millions de dollars en février 1977.
Le 6 octobre 1981, Anouar el-Sadate, le premier dirigeant arabe à reconnaître Israël, sera tué en assistant à un défilé militaire. Pour avoir voulu faire bouger une nouvelle fois les lignes, le Premier Ministre israélien Itzhak Rabin sera à son tour assassiné, le 5 novembre 1995. Avec son initiative du 6 décembre 2017, Donald Trump dit vouloir, lui aussi, sortir de l’impasse. Le chemin de Jérusalem, et au-delà de Jérusalem, le chemin de la paix…
Le professeur Boutros Boutros-Ghali (1922-2016) était membre de l’Académie malgache. Il fit trois voyages à Madagascar : en 1974, en tant que membre de la Commission internationale des juristes ; en 1987, pour son admission à l’Académie malgache ; et en tant que premier Secrétaire Général de la Francophonie. Il aurait pu nous prodiguer de vive voix cette leçon de neutralisme : «Les États faibles cherchent à employer la neutralité pour leur propre protection. Les États forts, au contraire, y voient souvent un témoignage d’hostilité. Il est extrêmement difficile de rester effectivement neutre : Thucydide l’a montré dans son Histoire de la guerre du Péloponnèse. Mais, il est possible de se servir de la neutralité habilement et avec succès, comme les États-Unis ont su le faire à divers moments de leur histoire».

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja


Code-Couleur

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La politique, malheureusement dans ce qu’elle a de plus vulgaire, impregne notre quotidien. Vulgaire, parce que la pratique politique malgache ne brille pas par les idées. Politiciens démagogues et population crédule en sont encore à un stade assez primaire, d’identification basique.

Par exemple, les couleurs. L’Arema, comme tous les partis communisants ou révolutionnaires, avait choisi le rouge, le même que celui du drapeau frappé de la faucille paysanne et du marteau ouvrier. Quarante ans après la création de ce parti, on voit rarement d’autres formations politiques s’approprier le rouge. Le choix initial est donc devenu confiscation de fait. On oublie cependant que le rouge, mais pourpre celui-là, avait été le «jaky mena» de nos anciens rois ; comme le pourpre cardinalice est dignité des princes de l’église catholique romaine.

L’orange avait été la couleur des manifestants ukrainiens de novembre 2004. Ils protestaient contre l’élection du candidat soutenu par la Russie. À l’appel du candidat malheureux Viktor Iouchtchenko, la foule accourut place Maïdan, à Kiev, et afficha une couleur uniformément orange qui devint signe de ralliement et générique de la «révolution orange». Les manifestants de la place du 13 mai, Analakely, de 2009, devaient ignorer ce détail que savaient sans doute leurs meneurs. Depuis, la couleur orange est devenue emblème d’une Transition qui, au mieux, aura aggravé dramatiquement une situation déjà critique ; et, au pire, aura ruiné pour plusieurs générations tout sens moral.

La «cravate bleue», d’accessoire vestimentaire sobre et élégant, est devenue l’uniforme des barons de l’actuel régime. Arborer une cravate bleue, pourtant choix d’un classicisme sans risque, peut désormais prêter à confusion. Les professionnels du retournement de veste, Arema en 1976, Hery Velona en 1992, Avi en 1996, Tim en 2001, Tgv en 2009, Hvm en 2017, en sont quittes pour un simple travestissement de cravate. Un ancien président de la République, quant à lui, a jeté son dévolu sur la cravate d’un rouge magnifiquement écarlate, invitant ses partisans à l’imiter : voilà qui privera les neutres d’une nuance supplémentaire au Pantone ; ils n’auront plus qu’a tomber la cravate à moins d’oser la cravate violette, la lavallière jaune, le noeud papillon vert…

Mais, c’est ignorer, une fois de plus, que, par exemple, le bleu est la couleur de l’écharpe de soie, la «khadag» ou écharpe de félicité, que les bouddhistes de Mongolie nouent aux vantaux des temples ou aux stupas. Bleu, c’est encore la couleur dominante dans la ville de Jodhpur, au Rajastan indien. Là-bas, ce serait le code-couleur du dieu Rama.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

 

 

 

 

Farany tsy manam-pahatamperana

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1970, 1971, 1972, 1973, 1974, 1975, 1976, 1977, 1978, 1979, 1980, 1981, 1982, 1983, 1984, 1985, 1986, 1987, 1988, 1989, 1990, 1991, 1992, 1993, 1994, 1995, 1996, 1997, 1998, 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018.
Tsy noheveriko mihitsy ho fohy tanisaina tahaka izay ny fiainako lasa. Antitra sa Tanora, efa antitra sa mbola tanora, andalana vitsy foana mamehy azy. Ampy sa fohy. Tsinona. Izaho.
Anefa raha mbola hotohizana, ho ampiana, tahaka io andalana vitsy io fotsiny sisa ny ambiny rehetra, mbola hiady varotra aho, ho tovanana kely : 2019, 2020, 2021, 2022, 2023, 2024, 2025, 2026, 2027, 2028, 2029, 2030, 2031, 2032, 2033, 2034, 2035, 2036, 2037, 2038, 2039, 2040… Impitopolokelifitopolo…
Vitsy sahady hay ny andalana mbola hiainako mihoatra amin’izay efa lany tsy hiverenana intsony.
Tsy hiadim-barotra loatra intsony, na maro aza ny ody faty. Taom-baovao, hifampirariana, hifampitsofan-drano, saingy fotoana tsy hay oviana amin’ilay tsy mba mifamotoana.
«Hiara-hiana ny andro androany, Ho toy ny andro farany, Hiara higoka izay tena mamy, Mandra-paha-lefy ny farany, Isaky ny andro izay mifoha, Mety ho farany io fa tadidio, Ka ataovy andro feno soa, Ho fahatamperana ny anio», hoy ny hiran’i Dadah tarika Mahaleo. Satria tsy misy ny doria.
Ny finiavantsika hanao veloma ny taona lasa, hiarahaba ny taona ho avy, hiantsa ny arivo taona mbola hihaonana, dia tampi-maso amin’ny fepetra maha-olombelona. Ahoana moa, hoy ilay, andalana, miverina ombieny ombieny, rehefa hanatitra ny havana na sakaiza hiala amin’ny varavaran-kazo ka hiditra amin’ny varavaram-bato : «miloloha lanitra ka tsy maintsy lena, mandia tany ka tsy maintsy solafaka». Isika.
Fohy tanisaina isika natera-behivavy. Satria natera-behivavy avokoa. Zaza, tanora, lehibe, antitra, efa ho faty.
2041, 2042, 2043, 2044, 2045, 2046, 2047, 2048, 2049, 2050… Ampy izay…

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Na taom-baovao isan’andro aza

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Isika olombelona ihany no manana aina manisa andro sy manara-bolana. Ka isaky ny roambinifolo volana, dia mifanome fotoana amin’ny arahaba isan-tokonam-baravarana. «Tratry ny Taona», hoy ny andaniny. «Samy ho tratry ny arivo mitsingerina», hoy ny ankilany. Izy roa samy mahalala fa firariana fe firariana ihany izany. Omaly alahady, androany alatsinainy, raham­pitso talata : tao anatin’izay fifandimbiasan’ny andro izay, fifandimbiasana tsotra faran’izay tsotra, no nivarina ny taona teo aloha ary nisandratra sasak’alina ny taona vaovao.
Na inona na inona firariana hifampizarana etsy sy eroa, iza no mbola hino fa ho vaovao avokoa ny andavanandro ? «Vaovao», izany hoe «hiova» : ny fahefa-mividy isan-tokantrano hiakatra tampoka, ny toe-karena malagasy hatanjaka tampoka, ny vola malagasy hitsaha-mitambotsitra tampoka, ny tany ama-monina handry fahizay tampoka, ny fitiavan-tanindrazana hilatsaka tampoka tahaka ny fanahy masina… Na taiza na taiza, na oviana na oviana, eny fa na taom-baovao isan’andro aza, tsy hoe satria niova ny taona dia raikitra ny fahagagana.
Ka inona ary no dia hanaovantsika ho toa zato ity andro voalohan’ny taona vaovao ity ? Tamin’ny andro taloha, raha teto Madagasikara fotsiny, dia fomba fiteny ny hoe «antomo-dava tahaka ny andro Fandroana». Ny Fandroana dia fanamarihana ny taom-baovao fony faha-Mpanjaka : tamin’izany andro izany, mety ho mbola azo noheverina hoe fiverenena an-kisavorovoro, «retour au chaos primordial», «ordo ab chaos», ny dingana rehetra tetezina mandritra ny alim-pandroana, eny fa na hatramin’ny hadimiana ambony mialoha sy ny hadimiana ambany manaraka aza.
Ankehitriny, inona no «ordo ab chaos» tontosain’izao tontolo izao ny 31 desambra ? Tsy misy ! Hifaly - hisotro, hihinana, hihira, handihy, hikorana - izay no tanjona tokana nimasoana vao nananontanona fotsiny ny volana desambra.
Taloha, ilay «fitsingerenan-kisavorovoro» nialohavana sy narahina sorona : ny rà, ny rano, ny tany, ny rivotra, ary ny afo no fandio. Miafara amin’ny fanavaozam-pitokisana eo amin’ny Andriamanjaka, «Razana-Nahary-an-tany», sy ny Ambanilanitra ny lanonana.
Omaly, izany hoe tamin’ny taona lasa, na teto Madagasikara na isaky ny firenen-drehetra, fifalifaliana no didy tokana sady hentitra. Mitsikia, miravoa, mibitaha. Androany, izany hoe amin’izao taom-baovao izao, fanantenana isan-karazany no hany filamatra. Tsy Naly Rakotofiringa ihany, fa isika olombelona ihany koa no hany manan’aina mahafan­tatra loatra fa «ny zavatra atomboka rehetra, dia hifarana hatreo amin’ny fetra, ny mateza dia tsy misy firy, fa na misy aza, angamba dia kiry, ny endrika sy bika soa, dia samy ho simba avokoa, na tanjaka na hery, dia mihena ary koa mihavery, satria, raha tonga amin’ny fetra, dia hifarana toy ny rehetra»… Mba tsy hamoizam-po angamba izany no isian’ny «Tsingerim-panantenana» isaky ny roambinifolo volana…

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

La solution est là depuis 1959 (bis)

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Il fallait organiser un référendum constitutionnel dès le lendemain des élections présidentielles de 2013. Dans cette précédente Chronique du 29 juin 2015, j’en exposais plusieurs arguments, qui n’étaient ni des alibis ni des prétextes. Comment abroger par un vote populaire contraire une Constitution censée ne jamais avoir existé, sans,
paradoxalement, lui reconnaître une existence bien réelle que, d’ailleurs, on ne saurait que difficilement lui refuser en sept ans de fait accompli…Il y a quatre ans, cette Chronique parlait de « donner vie légale à une Constitution par effraction» (Juridisme susceptible, Chronique VANF, 28.02.2014)…Fin et début de citation.
Et si la Constitution de 2010 était le problème de ce pays ?
Proposée unilatéralement à référendum par les autorités de la HAt (Haute Autorité de la transition), elle n’aurait
jamais dû voir le jour. L’accord politique préalable a été court-circuité par ce référendum du 17 novembre 2010. L’illégitimité de cette Constitution fut soulignée par la nécessité d’adoption de la feuille de route du 16 septembre 2011, dont l’objectif final était de déboucher sur des élections, notamment présidentielles, législatives et municipales
libres, justes, crédibles.
«Résumons : une Constitution adoptée presque sans qu’on y fasse attention, des articles que tout le monde découvrira trop tard, un rapport de forces auquel personne ne s’est préparé, une assemblée nationale dont on avait oublié les députés à géométrie variable, une majorité de l’esprit sans candidatures à l’échelle nationale. On avait
parlé de parenthèse s’agissant de la HAT, la suite emprunte encore l’ambiguïté des trois points de suspension…» (Avocat du diable, Chronique VANF, 25.02.2014).
«Un peuple légitime, convoqué aux urnes par une autorité parfaitement illégale, peut-il régulièrement adopter une Constitution qui ne soit pas censée n’avoir jamais existé ? Régulièrement, on s’était demandé la primauté, de la Constitution de 2010 ou de la Feuille de route de 2011, mais, au fil du temps, et pour ainsi dire subrepticement,
les visas de la HCC – “Vu la Constitution” – ont achevé de donner vie légale à une Constitution par effraction» (Juridisme susceptible, Chronique VANF, 28.02.2014).
Le 8 octobre 1972, le général Ramanantsoa, auquel les pleins pouvoirs furent remis au mois de mai précédent, organisait un référendum de double ratification : du programme-cadre du Gouvernement présenté le 27 juillet 1972, et des pleins pouvoirs. La loi constitutionnelle, promulguée le 7 novembre 1972, reléguait la Constitution du 29 avril
1959, en ses dispositions non contraires, au rang de loi ordinaire.
Dans la Constitution du 29 avril 1959, et restée en vigueur jusqu’au 7 novembre 1972, le Gouvernement de la République était composé du Président de la République, du Vice-Président du Gouvernement,
des Ministres et des Secrétaires d’État. De 1959 à 1972, le Président de la République nommait directement les membres du Gouvernement et désignait parmi eux le Vice-président du Gouvernement.
Le mécanisme des relations entre le Gouvernement et le Parlement est intéressant dans cette Constitution de 1959, en ses articles 43 à 45. En cas de refus d’approbation du programme gouvernemental par les députés ou si l’Assemblée Nationale vote une motion de censure contre le Gouvernement, les ministres démissionnent. Si l’Assemblée Nationale rejette encore le programme du nouveau Gouvernement, elle est immédiatement dissoute. Après de nouvelles élections législatives, le même programme gouvernemental est soumis au vote des nouveaux députés : un autre refus d’approbation entraîne la démission du Président de la République qui ne peut plus se présenter à la future élection présidentielle. Et si cette recette ancienne était la solution actuelle pour sortir du face-à-face entre un Président de la République sans majorité présidentielle stable et une Assemblée Nationale qui a introduit le facteur défiance en actionnant une motion de déchéance contre le Chef de l’État ?
(fin de citation)

Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Donald Trump, homme de l’année 2017

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Contrairement à certains autres pays qui débattent jusqu’à l’absurde de la date des élections, pour mieux les repousser aux calendes grecques, aux États-Unis, on a décidé, une bonne fois pour toutes, que l’élection présidentielle se déroulera « le premier mardi qui suit le premier lundi de novembre ». Et que le jour de l’investiture par la prestation de serment sera le 20 janvier : tradition maintenue depuis 1937 et la deuxième investiture de Franklin D. Roosevelt.
20 janvier 2017 : Donald Trump devient le 45e « POTUS », président des États-Unis d’Amérique. Depuis, les relations internationales sont marquées par sa manière caractéristique de tendre la main aux autres grands de ce monde (le Chinois Xi Jinping, le Russe Vladimir Poutine, le Français Emmanuel Macron) ou de ne pas la tendre (à la chancelière allemande Angela Merkel). Sa parole sur son compte Twitter ponctue l’actualité. Quoi que puisse penser de lui le politiquement correct, pleurant après son prédécesseur Barack Obama, Donald Trump aura marqué l’actualité internationale 2017.
6 avril. Ce jour-là, le président chinois Xi Jinping était l’hôte du président américain à Palm Beach. Mais, Donald Trump avait décidé que la mort de 27 enfants, dans une ville contrôlée par les jihadistes, était « la ligne rouge » que le président syrien Bachar al-Assad avait franchie. Mettant à exécution sa menace, Donald Trump fit envoyer 59 missiles tomahawk détruire la base aérienne syrienne d’Al-Shayrat, après des allégations de bombardements à l’arme chimique sur la ville de Khan Cheikhoun. Les Russes, dont des soldats assistent l’armée syrienne, avaient été prévenus de la frappe, sans pouvoir (ou vouloir) s’y opposer.
13 avril. Donald Trump balance sur les islamistes d’Afghanistan la « mère de toutes les bombes », MOAB, la plus puissante bombe conventionnelle de l’arsenal militaire américain, hors les armes nucléaires. Les analystes s’entendent pour dire qu’il s’agissait plus de démontrer aux yeux du monde une force de frappe intacte que d’une opération réellement pratique. Le Nord-Coréen Kim Jung-Un serait bien avisé de méditer les exemples afghan et syrien : le discours du 19 septembre de Donald Trump, devant l’Assemblée Générale des Nations unies, menaçant de détruire la Corée du Nord pouvant se concrétiser par la grande sœur de MOAB.
6 décembre. Le président des États-Unis, Donald Trump, reconnaît Jérusalem comme capitale d’Israël. Et donne l’ordre à son administration de déménager l’ambassade américaine depuis Tel-Aviv à Jérusalem. Le 12 octobre, Donald Trump avait déjà sorti les États-Unis de l’UNESCO dénoncée comme une tribune pro-arabe et anti-israélienne. J’ai passé les derniers jours de 2017 à relire « Ô Jérusalem » de Dominique Lapierre et Larry Collins (Robert Laffont, 1971). Histoires inextricables d’amitiés sincères et de méfiance viscérale, comme seules peuvent en exister entre des voisins intimes qui se côtoient au quotidien depuis des siècles dans l’étroitesse de la Vieille Ville de Jérusalem. Comme l’écrivent les auteurs en prologue : « C’était le 14 mai 1948. Ce jour vit les Anglais quitter la Palestine, les Juifs proclamer l’État d’Israël, les Arabes partir en guerre. Un conflit allait embraser la Terre sainte et ne plus s’éteindre ». Cette fois, au moins, Donald Trump n’y était pour rien.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Projet de psycho-société

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Comme si  cela ne suffisait pas ! Madagascar était déjà une île-continent, «plus grande que la France et le Bénélux réunis», ainsi que nous récitaient nos anciens manuels d’histoire. Mais, il a fallu y rajouter le décalage, persistant et croissant, entre la ville et la campagne (Madagascar serait à 80% paysan soulignent régulièrement les documents de la Banque mondiale ou du PNUD) ; le fossé grandissant entre des hyper-riches vivant à l’heure de New York ou Paris, et depuis peu Dubaï ou Hongkong, l’île Maurice ou l’Afrique du Sud, d’une part ; le lumpen proletariat de villes alimentés par le «choix des pieds» et un exode rural qui vide les campagnes sans que jamais aucune statistique n’actualise les certitudes de tantôt, d’autre part ; et quelque part au milieu, sans doute plus pour très longtemps d’ailleurs, une classe moyenne en voie de disparition.
Madagascar et le désert tananarivien, également, ou de l’absence d’un juste milieu, d’équipements urbains, d’infrastructures médicales, de tissu scolaire, sitôt franchies les frontières, d’ailleurs lâches, floues et tentaculaires, de l’ancien Antananarivo intra-muros (en l’occurrence intra-hadivory, même si la Capitale a depuis un siècle, et dès avant 1895, franchi ses antiques «vavahady» et comblant au passage ses «hady», fossés défensifs, aujourd’hui oubliés (Ankadinandriana, Ankaditapaka, Ankadifotsy).
La citadinité, mais laquelle, encore. Sur «Tana», un microcosme tananarivien constitue une citadinité d’elle-même (of her own) qui évolue pour ainsi dire à part, franchement tangente par rapport à «autrui» qui  la regarde vivre sans qu’elle-même se rende encore compte de la réalité, qu’elle devine difficile de ce quotidien «autre», si proche et tellement lointain. À distance moyenne d’Antananarivo, de sa sortie Sud (Ankadimbahoaka, Tanjombato) et de sa sortie Est (Mahazo, Ambatobe), deux villes, Antsirabe et Toamasina, se caractérisent par une relative modernité : au moins à un titre, les quotidiens tananariviens, dont les pages régionales sont réduites à la portion symbolique, y parviennent dans la journée.
Les autres chefs-lieux sont déjà trop loin, authentiquement «provinciaux», livrés à eux-mêmes : l’obligation d’assumer une grandeur déjà trop lourde à porter pour le peu de moyens d’une décentralisation qui n’a jamais été au-delà des mots, ne serait-ce que celui de «financière». Les mots d’un chercheur de l’Université de Caen, Jean Lavoué, me semblent leur s’appliquer à merveille : «la perception d’un social éclaté renvoie d’abord à la grande solitude des individus dans nos sociétés technocratiques avancées. Plus de cadre pour affermir sa mémoire. Plus d’appartenance. Plus de futur imaginé ensemble. Nulle projection vers un devenir commun. L’homme de la fin du XXème siècle doit assumer seul le dur métier de vivre (…) le vide social s’est installé au coeur même du dialogue du “je” avec “soi-même” (…) Comme il est difficile de décider seul de ce qui est bon pour soi !» (Reconsidérer les miettes du social, International Review of Community Development (20), 1988, p.48).
C’est dans cette société malgache, pour cette société malgache, et par (?) cette société malgache, qu’il nous faudrait (re)trouver un projet de société. Quelque chose qui transcende les particularismes de notre double exception culturelle : tournés vers l’extérieur, nous sommes une île ; tournés sur nous-mêmes, nous sommes un archipel intérieur d’îles «foko». La société malgache peut-elle être, ou non, la somme de ses «exceptions culturelles» ?
Paradoxalement, sinon par quelque ironie, parti en quête d’un projet de société, je me retrouverais à souhaiter un leadership. Est-ce l’orientation collective commune qui dessine le leader ou c’est le leader qui trace l’orientation collective commune ? Question schizophrénique.
Voilà 170 ans, «Le Manifeste du parti communiste» de Karl Marx avait pu tracer une nouvelle conception du monde qu’allaient essayer de mettre réellement en pratique les révolutions russe, chinoise, vietnamienne ou cubaine du XXème siècle. En 1896, et toujours en allemand, le Juif Theodor Herzl écrivait son livre au titre explicite «Der Judenstaat», l’État juif, qui allait progressivement prendre corps à travers la «déclaration Balfour» (2 novembre 1917) ou le vote des Nations Unies du mercredi 26 novembre 1947. Deux siècles après le «riaka no valam-pariako» du roi Andrianampoini­merina, que saurions-nous inventer d’assez exaltant pour tracer la marche et montrer la voie, bouger déjà, avancer enfin et sortir de cette impasse ?
Les penseurs de la société sont nombreux à souligner l’absence, désormais, de consensus macro-social (Jean-Pierre Boutinet) ; l’omniprésence, par contre, de la «solitude urbaine» (Johanne Gauthier) ; le dialogue, encore à inventer, entre «solidarité» et «solitude», cette dernière «jamais autant vécue, et jamais aussi peu étudiée» (Michel Hannoun).
Mon voyage intellectuel fut sur le mode de «Making sense of today’s chaos» (Alvin Toffler). La grille de lecture universelle, «la civilisation de l’angady, la civilisation de la chaîne d’assemblage, la civilisation de l’ordinateur», permet-elle de comprendre la société malgache d’hier et d’aujourd’hui comme de préparer à la société malgache de demain ?
Dans «Guerre et contre-guerre» (Fayard, 1994), Alvin Toffler et Heidi Toffler achèveraient presque de décourager l’architecte d’un projet de société pour le XXIème siècle : «les idées, les images et les symboles sont pris dans un véritable tourbillon, et l’individu pioche parmi les différents éléments pour former sa mosaïque ou son collage propre».

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

L’eau retrouve son lit dans le Betsimitatatra

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Bien avant l’arrivée de ce cyclone du Nouvel An, il pleuvotait quotidiennement dès après Noël. Que d’eau, que d’eau. Quoi de plus normal que la cuvette d’Antananarivo soit remplie à ras bord. Mais, sans doute que les autorités qui accordent les permis de remblais dans le Betsimitatatra ne savent pas que la saillie granitique, qui porte Manjakamiadana, plonge sous la plaine pour remonter plus à l’Ouest. De profil, la plaine du Betsimitatatra se présenterait sous la forme d’une paume et l’eau stagne en son réceptacle.
Non que je me réjouisse, mais je profite de chaque épisode pluvieux pour rappeler, et marteler, des vérités physiques auxquelles la Mairie de la Capitale, le Ministère des Villes, l’Aménagement du Territoire, voudraient passer outre. Non, on ne remblaie pas impunément la plaine du Betsimi­tatatra ! Non, on ne remblaie pas impunément toutes ces anciennes rizières nourricières, depuis le Laniera jusqu’à Fenoarivo !
Et pourtant, le long de ces nouvelles rocades, que de turpitudes derrière ces clôtures qui ne cachent pas le va-et-vient des camions surchargés d’une terre elle-même indûment prélevée à quelque colline alentour. Sur la RN1, juste après Anosizato, une double anomalie : d’abord l’extrême concentration de quatre stations-service (une Shell, une future Jovenna, une autre Shell, une Galana) sur un kilomètre ; ensuite, les remblais inconsidérés sur lesquels il a bien fallu aménager ces constructions. De nuit (et pourquoi nuitamment ?), la folle ronde des camions qui se croisent et se recroisent entre Anosizato, Fenoarivo, Alakamisy, Ambatomirahavavy, ne semble jamais susciter la curiosité des gendarmes et policiers. Pas plus que ne s’émeuvent les élus et les nommés.
J’ai pu lire le témoignage d’une habitante d’Ankorondrano inondée : la personne demande aux autorités d’évacuer l’eau de chez elle…
Mais, évacuer où ? On pourrait bien parodier La Fontaine, et renvoyer la Mairie et les Ministères à leur légèreté : « Vous remblayez tout le
ririnina ? J’en suis fort aise. Eh bien ! Écopez maintenant ! », mais la population elle-même oublie trop souvent la toponymie ancienne, antique, de ces lieux : AnkorondRANO, AndRANObevava, AndRANOvory, AndRANOmahery, SoaRANO, AndRANOmanalina. Que d’eau, que d’eau, rano, Rano, RANO.
Ampefiloha, c’était une digue ancienne.
Les noms d’Ankaditoho, Antohomadinika, ou Andava­mamba supposent une faune aquatique, donc l’omniprésence de l’eau. Et pourquoi donc aNOSIpatrana, aNOSIzato, aNOSIBE, sinon des îlots sur cette mer intérieure entre Ikopa et Mamba ?
Encore, les quartiers sommitaux desdites îles sont perchés à une distance raisonnable des pires crues. C’est que les anciens Merina étaient prévoyants, respectueux de la vieille tradition de résidence collinaire. Mais, là où, tous les ans, depuis au moins 1896 et le choix délibéré de l’administration coloniale française d’urbaniser cette plaine inondable, l’eau retrouve inéxorablement son lit, nous l’appelons la «Ville basse» : ce polder inachevé, ce polder impossible, ce polder indésirable, nouvelle malédiction d’un Sisyphe malgache.
Alors, à moins de livrer le Betsimitatatra aux remblais, mais alors définitivement et absolument, vider chaque goutte de la cuvette au pied du Rova, bétonner chaque centimètre carré entre les berges de la Mamba et les rives de l’Ikopa, ouvrir un parapluie géant au-dessus d’Antananarivo, je ne vois pas comment la nature ne reprendrait pas régulièrement ses droits. Et les humains de se rendre enfin à la raison.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja


Lâcher prise

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La «Grande Muette» devrait rester, justement, muette. Il est bon que les chefs militaires rétablissent les fondamentaux de «discipline» et de «hiérarchie», mais inutile d’en faire la publicité. C’est par des actes, en interne, que le problème doit se régler, pas en conférence de presse. Que les accents martiaux tonnent, mais en rassemblement, pas à la Une des journaux. Qu’une armée respecte le principe hiérarchique et fonctionne à la discipline, rien que de parfaitement normal, alors pourquoi en faire un gros titre. Le soleil se lève à l’Est : qui s’en soucierait au quotidien, ce n’est même pas un marronnier journalistique.
Les militaires malgaches, par la faute d’une poignée de minables, n’ont que trop fait parler d’eux. La démarche de normalité de l’armée malgache doit d’abord être une attitude de banalité. Qu’on n’entende plus les généraux se mêler de politique (ou d’économie) et qu’on n’entende plus murmurer dans les rangs.
En France, des généraux s’étaient exprimés sous le nom de plume «Surcouf». Pour critiquer le «Livre Blanc sur la défense et la sécurité nationale». Cinq ans plus tard, en 2013, des capitaines et lieutenants, réunis sous le nom de «collectif Marc Bloch», devaient dénoncer «le déclin militaire de la France» en regrettant sa perte de capacité opérationnelle. En Grande-Bretagne, c’est en 2010 que cinq amiraux à la retraite (Lord West, Sir Julian Oswald, Sir Jeremy Blackham, John McAnally, Julian Thompson) choisirent de critiquer la réduction du format de la Royal Navy, comparant la situation à la perte de Singapour face aux Japonais, en 1942. Chaque fois, ces militaires, français (réfugiés dans l’anonymat) ou britanniques, s’exprimant en leur nom et non en celui de l’institution, n’ont abordé que le sujet militaire : leur domaine de moindre ignorance.
Que des militaires malgaches évoquent la réforme de l’académie militaire, un nécessaire déploiement maritime ou la reconstitution d’une armée de l’air, ne ferait pas scandale. Mais, on ne souhaite plus que l’armée s’immisce dans la politique. La mutinerie d’un régiment, en 2009, avait entraîné Madagascar dans la pire catastrophe de son histoire républicaine.
Quand les chefs militaires prennent la parole, qu’ils soient conscients d’abord de ce traumatisme dans l’opinion. Dans un pays à la culture politique encore balbutiante, il leur faut ne pas oublier le poids de leurs étoiles et l’instrumentalisation qu’on peut faire de chacun de leurs mots. En 1972, la classe politique malgache était encore plus embryonnaire qu’actuellement. Et il avait semblé presque naturel qu’un régime aux abois fasse appel à la seule structure organisée de l’époque : l’armée. La politisation de l’armée, qui allait s’ensuivre, la perte des repères, l’embrouillamini des valeurs, ont culminé dans le putsch de 2009. Nous voilà en 2018 : il faut aux généraux la sagesse de renoncer à peser. En psychologie, à moins que ce ne fût une vieille sagesse bouddhiste, il faut savoir lâcher prise.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Son Excellence l’ambassadeur ou l’ambassadeur excellence ?

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L’Allemagne avait pu faire de son «Made in Germany» un générique mondialement reconnu de qualité et de robustesse et de son «Deutsche Mark», une arme presque aussi puissante qu’avait pu l’être sa Wehrmacht. Quant au Japon, son image à l’international passe désormais par l’esthétique de la rondeur bonhomme «Kawaï», l’attitude «Kai-Zen» devenue concept de management ou l’engouement planétaire pour les «Mangas» et «Anime». La diplomatie culturelle du «PNB du Cool» est devenue à son tour un concept des relations internationales : le 29 novembre 2017, très officiellement, le ministre japonais des Affaires Étrangères nommait les personnages imaginaires de Pikachu et Hello Kitty comme ambassadeurs de la ville d’Osaka, candidate à l’organisation de l’Exposition universelle 2025. J’ai retrouvé cette Chronique du 27 mai 2017 que je dédie aux deux dames, Mireille Mialy Rakotomalala et Arisoa Lala Razafitrimo, nommées ambassadeur de Madagascar, respectivement au Japon et aux Nations Unies.
(Début de Citation). Le Président américain a reçu le Président français à l’ambassade des États-Unis à Bruxelles (Belgique). Sur une image, on pouvait voir Donald Trump attendre Émmanuel Macron sur le perron de l’ambassade américaine. Ça avait de la gueule. Aurait-on pu faire pareil à notre immeuble anonyme boulevard Suchet à Paris, ou à la modeste ambassade, où j’avais pu participer au 26 juin 1996, sur Massachusetts Avenue à Washington D.C. ?
Hier, à 7 heures 30, j’ai pu assister à cet étrange spectacle : devant l’ambassade des   États-Unis, à Andranomena (Andranoro-Antehiroka, sur le portail officiel, fait plus «historique»), un policier malgache est en faction pour régler la circulation d’une manière assez particulière. Les habitués de cet axe Ambohibao savent combien y sont pénibles les embouteillages vers Ivato. Le policier en question repère donc les voitures arrivant d’Antananarivo, arrête la file venant d’Ivato, et invite lesdites voitures (ou VTT des expatriés) à déboîter pour accéder plus rapidement à l’ambassade US.
J’imagine que dans cette immense ambassade, autrement plus majestueuse que l’ancienne sise à Antsahavola (au passage, il faut signaler la détérioration de la chaussée à Antsahavola, là où pour la sécurité de l’ancienne ambassade, avait été enterré un dispositif de pont-levis : celui-ci retiré, le trou n’a pas été correctement comblé ni la voie publique remise en état), pourrait permettre à Donald Trump de recevoir très correctement en terre malgache son homologue russe Vladimir Poutine, à moins que ce ne soit ce dernier qui l’invite à l’ambassade russe d’Ivandry : un autre immense complexe, comme celui de la Résidence de France, celle-ci bien connue des habitués pour son garden-party du 14 juillet, sinon comme celle de la Chine à Nanisana.
États-Unis, Russie, France, Chine : ces quatre membres du Conseil de sécurité des  Nations unies (la résidence britannique du lotissement Bonnet, que j’avais pu fréquenter en mes années de boursier du British Council, ne déméritait pas sans atteindre au grandiose) entretiennent à Madagascar (comme je suppose dans d’autres pays) une ambassade digne de leur rang. La diplomatie est d’abord aussi question d’image renvoyée : on peut se gausser des dépenses ostentatoires, mais on regardera toujours avec une certaine commisération une ambassade réfugiée dans un immeuble collectif d’un quartier périphérique. Et quoiqu’on puisse arguer de l’extraterritorialité, je suppose qu’un transfuge se sentirait beaucoup mieux en sécurité dans un bunker (surtout sous la protection de la bannière étoilée : quoique, les ambassades américaines de Téhéran ou de Tripoli n’avaient pas pu résister à la détermination fanatique et sans scrupule juridique d’un commando islamiste) que dans un container aménagé.
La robustesse du «Made in Germany» ou le «PNB du cool» ont fait davantage, pour l’Allemagne ou pour le Japon, que cent ambassades. Et pourtant. Ces deux pays partaient de loin : encore désignés «ennemis» dans la Charte de San Francisco en 1945, l’un confondu avec les atrocités nazies, l’autre associé aux exactions de ses troupes envers les populations d’Asie. Heureusement, le monde entier finira par comprendre qu’une tondeuse Braun ne peut être un instrument SS ni le Walkman de Sony un katana de samouraï. Ce «miracle» ne prit que 30 ans. Mais, ce furent trente années de labeur, de persévérance, d’excellence : faire bien les choses simples qu’on sait faire.
Qui précède quoi : le travail de l’image ou l’image par le travail ? Son Excellence l’ambassadeur ou l’ambassadeur excellence ?

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

La réalité, en face

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Quel serait le contraire de «pays de merde» ? To be or not to be : c’est une question. Une hypothèse à supposer même que ce pays presque idéal existe. Or, il se trouve que plusieurs d’entre nous ont déjà vu et pratiqué ce pays. Comme disait Platon, Saint-Paul ou Augustin, repris par Belloiseau, citant lui-même Pascal, comme lui fit dire Marcel Pagnol dans «Manon des sources», où j’aurai donc retrouvé la maxime : «Tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais déjà trouvé».
Un pays que ses natifs ne fuiraient pas à n’importe quel prix, fût-ce à celui de leur vie. Un pays où pour chacun, les libertés d’opinion, d’expression, de religion, seraient garanties. Un pays où chacun, sinon la plus grande majorité de la population, mangerait à sa faim, quantitativement et nutritionnellement. Un pays où chacun, et surtout les plus démunis, auraient accès à des soins de qualité. Un pays où chacun aurait une chance égale d’accéder à une éducation de qualité. Un pays où tous auraient droit à la justice.
Pourquoi des millions de gens quittent là où ils avaient toujours vécu, là où leurs ancêtres étaient nés, là où ils auraient eux-mêmes voulu mourir, sinon parce que les infrastructures de base n’existent pas. Ou que derrière le décor de beaux mobiliers urbains, le goulag de la persécution en constitue l’envers. Et que, là où les ancêtres avaient vécu, là où eux-mêmes ont vu le jour, les enfants n’auraient plus aucun avenir.
En 2018, qui s’offusquerait que les livres d’histoire traitent les pays communistes de derrière le «rideau de fer» de «pays de merde» ? Combien furent-ils à avoir payé de leur vie la tentative de s’échapper de la prison de Berlin-Est ? Ils furent encore des milliers et des milliers, devant les télévisions du monde entier, à vouloir s’échapper du «paradis socialiste» par une trouée dans les barbelés hongrois. Ce n’était jamais qu’en 1989.
Le choix des pieds conduit ailleurs : qui pour la SéCU, qui pour une université, qui pour s’affranchir d’un burka, qui pour l’insolence d’une caricature, qui pour le confort d’ordures ramassées et de routes sans nids de poule.
Bien sûr, après quatre heures d’une réunion d’urgence pour arracher une unanimité sans doute pas tellement évidente, les 54 pays du «Groupe Africain» auprès de l’ONU sont parvenus à exprimer leur indignation vertueuse d’une seule voix après les propos supposés de Donald Trump. «Supposés» parce qu’aucun enregistrement n’existe pour en attester de la véracité sinon de la simple réalité.
Cependant, ceux qui se seraient reconnus dans cet épithète, devraient d’abord, et surtout, s’atteler à équiper des hôpitaux, assurer une éducation de qualité, garantir une justice équitable, assurer la sécurité des biens et des personnes, construire des ponts qui ne s’effondrent pas à chaque brise, ne laisser aucune famille mourir de faim, rendre confiance en la démocratie des libertés. Sinon, et pas besoin de Donald Trump, leurs administrés savent bien que ce sont des dirigeants de merde.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Votre humble serviteur

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Nous sommes en l’an 82 avant J.-C. Quand le général romain Lucius Cornelius Sulla ou Sylla (138-78 avant J.-C.) gagna la guerre civile contre les partisans de Marius, il fit impitoyablement massacrer 7.000 prisonniers (dont 13 généraux). Nommé dictateur perpétuel en violation du principe même de République, qui devait fonctionner avec un consul élu pour une année non renouvelable, Sylla fit afficher dans les rues de la Cité la liste de milliers de proscrits qui devaient fuir. Parmi eux, le futur Jules César. Sylla rétablit le Sénat patricien dans son prestige en lui confiant l’exclusivité de l’initiative des lois aux dépens des tribuns de la plèbe. Pensant restaurer la République, Sylla se devait de renoncer lui-même au pouvoir. Il abdiqua donc, en 79 avant J.-C. : j’avais cru lire (dans «La fin des rois : Histoire des républiques et des républicains» de William Everdell) qu’il redevint un simple paysan guidant sa charrue, mais plus réellement, il semble qu’il se soit retiré dans sa maison de campagne en compagnie de sa cinquième épouse, de 35 ans sa cadette. Il y mourut un an plus tard.
Nous voici en 1948, le 14 mai. Sous un portrait de Theodor Herzl, l’auteur de «L’État juif» (1896), David Ben Gourion proclame la naissance de l’État d’Israël. Premier Premier Ministre du nouvel État, il le restera pendant treize ans (1948-1954, 1955-1963). Auparavant, et depuis 1935, il avait été le dirigeant de l’Agence juive. Juif ashkénaze, né à Varsovie (Pologne) en 1886, David Grün avait fait partie des sionistes fondateurs de Tel-Aviv dans les sables du port de Jaffa, en 1909. Sous sa direction, les Juifs gagnèrent contre les Arabes les guerres de 1948-1949 et 1956, et on peut raisonnablement croire que le saut qualitatif en armements durant la trêve du 11 juin au 9 juillet 1948, a préparé la supériorité militaire de Tsahal dans la guerre «des Six-Jours» (1967) et celle du Kippour (1973). Sa démission, en 1963, intervient après qu’il eut pleinement accompli sa mission de création et de consolidation de l’État d’Israël. David Ben Gourion, le sioniste socialiste, «curieux mélange de marxisme et de nationalisme juif», se retire dans l’austérité du kibboutz Sdé Boker, dans le désert du Néguev, où il meurt peu après la «guerre du Kippour», en décembre 1973.
Nous sommes en 2018 : où sont les Sylla et les Ben Gourion ? Ceux qui, tout entier dédiés à leur mission, avaient, certes, pu commettre des atrocités contre leurs adversaires ou sacrifié les Juifs de Vieille Ville de Jérusalem pour donner l’exemple de la résistance à tous les Juifs de Palestine. Mais, ils avaient été les serviteurs d’un idéal. Confusément, pour sauver une République déjà moribonde en attente de son «Auguste» ; méthodiquement dans l’établissement d’un foyer juif en Palestine. Une certaine idée qui dépassait leur petite personne et au service de laquelle l’un comme l’autre n’hésita pas au renoncement suprême : une sorte de «suicide en plein bonheur», un autre «lâcher prise». Quitter le pouvoir et ses honneurs, lui survivre sans fin tragique, au milieu de ceux dont on fut le ministre-serviteur, sans haine voire quelque admiration sinon de la gratitude.

Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

Le sous-développement, voilà la vraie insulte

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Je ne me sens pas atteint par une insulte qui ne me concerne pas. Sauf qu’on a accolé à mon île des qualifi­catifs toujours plus péjoratifs à mesure que l’on s’éloignait de la fin de la deuxième guerre mondiale et que, contraire­ment à des pays authentiquement décimés par la guerre, l’Allemagne ou le Japon, voire la Corée du Sud, Madagascar a emprunté une trajectoire inverse.
Le «pays d’avenir» s’est enfoncé de plus en plus profondément dans le «Tiers-monde», expression inventée par Alfred Sauvy en 1952. L’abandon de ce vocable n’a pas changé la situation de Madagascar. Les écoles, les hôpitaux, les routes, l’habitat campagnard, les taudis urbains, semblent toujours appartenir à une époque depuis longtemps révolue sous d’autres cieux. Dans les années 1980, j’avais pu lire un magazine sur l’état de Nanterre dans les années 1950 : on eût dit, alors, le paysage familier des bas quartiers autour de la colline d’Antananarivo. Depuis, cet Ouest parisien a emprunté le train d’au moins une modernité d’équipements : pour ne parler que de l’abandon du lavabo solitaire en intérieur, la fin de la salle d’eaux commune sur le palier, avant la généralisation de l’accès à l’eau courante à domicile, tandis que la Une des journaux tananariviens de 2018 montrent encore des files de bidons et jerrycans attendant leur tour à une borne-fontaine.
Quand je lis les Alphonse Daudet (mort en 1897), Émile Zola (né en 1840), Jean Giono (né en 1895), Marcel Pagnol (né en 1895), Bernard Clavel (né en 1923), et leurs romans-documentaires sur la vie des gens simples, je me demande chaque fois comment ces Français-là avaient pu se projeter à conquérir Madagascar en 1895. C’est que leur réalité, leur quotidien, les conditions de leur vie, ne les situaient pas à des années-lumières du dépouillement des populations malgaches qui leur étaient contemporaines. Sauf, peut-être qu’une masse critique existait déjà dans la France d’alors sur le point d’accéder à un statut social intermédiaire. Tandis que, chez nous, en dehors de courtisans et leurs clients gravitant autour de la Reine et du Premier Ministre, la grande masse de la population malgache continuait de vivre une réalité plus proche du Moyen-âge que de la première Exposition universelle de Londres.
Il n’est pas moins vrai qu’à l’articulation des périodes Andrianampoinimerina et Radama, entre la fondation d’une organisation étatique et la première reconnaissance à l’international, tandis  que nous balbutions encore les rudiments d’une certaine modernité, Pitt (1759-1806), Talleyrand (1754-1838) ou Metternich (1773-1859) conjuguaient déjà à tous les modes leur science de l’État et des intrigues internationales. Sans parler des avancées médicales, des inventions technologiques, des idées philo­sophiques.
Appartenir au groupe des «PMA», pays les moins avancés et, à ce titre, être éligible à l’IPPTE : «initiative en faveur des pays pauvres les plus endettés» ; se voir imposer des «programmes d’ajustement structurel» ; passer par la porte tellement basse, qu’elle en devient une chatière pour animal domestique, des conditionnalités des bailleurs de fonds ; devoir se féliciter de la reconduction de telle aide ou de telle assistance qui sont autant d’aumône : là sont les vraies insultes, là est la véritable humiliation.

par Nasolo-Valiavo Andriamihaja

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